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Interview

Interview Keito Koume

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Depuis le premier tome de Spice & Wolf, le succès d’estime a muté en bouche-à-oreille ravageur pour ce seinen riche d’aspects sentimentaux, fétichistes et… économiques ! On est donc allé à Japan Expo 2013 avec des questions plein les joues pour Keito Koume, l’homme derrière ce manga juste parfait (c’est dit).

Un peu anxieux, Keito Koume, à l’idée de venir en France ? Peut-être bien, sachant qu’il a demandé à connaître les questions des journalistes un mois avant les interviews, « pour mieux réfléchir à ses réponses » nous souffle alors son éditeur français, Ototo. Chez Coyote Mag, on refuse poliment toute ingérence de ce type, fréquentes de la part d’éditeurs japonais soucieux de maîtriser ce qui s’écrit sur leurs mangas. Mais pour une fois, on s’est plié au jeu (règle n°1 : ne pas envoyer toutes les questions), en partant du principe que le motif était sincère et que c’était bien une demande de l’auteur.
À Japan Expo, le mangaka n’était pas vraiment à l’aise au milieu de la foule mais il a pris grand soin à dédicacer pour ses lecteurs. En interview, Keito Koume s’est montré ferme, assuré, et il n’a pas été sans nous rappeler Lawrence Kraft, ce marchand nomade au regard doux mais qui ne s’en laisse pas compter en matière de business dans SPICE & WOLF…

Non, merci !
Keito Koume a d’abord officié dans le manga typé otaku (KUJIBIKI UNBALANCE, mini-série dérivée de GENSHIKEN), à tendance moe (UTA-KATA et ses adolescentes confrontées à des problèmes d’adultes), sans oublier des mangas classés hentai. Découragé par le côté « mission impossible », il avait d’abord refusé d’adapter SPICE & WOLF, la série de romans signés Isuna Hasekura à l’origine du manga, d’un anime en 24 épisodes, d’un jeu-vidéo et d’un show radio. Une adaptation pas forcément littérale :

« Pour adapter en détail les dix-sept volumes du roman, le manga serait publié pendant vingt ans ! Il faudra donc faire des choix, certains chapitres ne pourront pas y figurer car à un moment il faudra se concentrer sur la relation entre Lawrence et Holo, raconter comment cela finit entre eux ».

Fait pour ce type de projet, Koume scénarise lui-même à partir du texte original :

« Isuna Hasekura m’a d’emblée rassuré quand je l’ai rencontré : impossible, bien sûr, de toucher à la trame principale de l’histoire et au caractère de Holo, mais c’était bien tout ».

Unique Holo
Autre contrainte : Koume devait donc être raccord avec le chara-design déjà posé par Jyuu Ayakura, illustrateur des romans.

« Forcément, pour Lawrence et Holo, je me suis basé scrupuleusement sur son travail. Par contre, pour les personnages secondaires, qui sont très nombreux, je n’avais aucune directive, j’ai pu les créer à ma manière en m’inspirant du texte original ».

Et il a fallu suer sang et eau pour insuffler la vie à Holo dans le cadre d’une bande-dessinée :

« Mes premiers essais n’étaient pas concluants – on m’a même dit que ma Holo avait de l’embonpoint ! – et il m’a fallu trois tomes pour maîtriser ce personnage dans les moindres détails. Holo est l’héroïne et le meilleur argument du manga, je suis toujours très attentif à la dessiner de façon à ce qu’elle soit unique ».

Pari tenu : elle est de ces muses qui hantent l’esprit par son chara-design inspiré et la complexité de ses contradictions – charmeuse et insaisissable, fragile et redoutable, épicurienne et pourtant nimbée de tristesse – avec à la clé un personnage devenu iconique chez les otakus. Quant aux décors de ce road-manga qui traverse un nombre incalculable de lieux et de paysages, le mangaka a eu accès à l’intégralité des archives de préproduction de l’anime chez les studios IMAGIN et Bihou :

« Ils avaient déjà défini énormément de lieux et j’ai puisé dans leur travail pour définir les décors ».

Divine tentation
Holo incarne bien sûr un érotisme latent, que Koume traduit idéalement en images sans jamais trop insister sur son sex-appeal.

« Je ne m’interdis pas que Holo soit un personnage sensuel, voire érotique, après tout SPICE & WOLF est publié dans un magazine seinen (Dengeki Maoh – Ndr) où d’autres séries vont bien plus loin ! Je cherche par contre à éviter toute vulgarité, je veux que Holo reste… charmante. Et si vous trouvez que certaines scènes vont assez loin – trop ? – dites-vous que je ne dépasse jamais ce qui était déjà dans le roman ».

Ce travail tout en nuances est – forcément – aux antipodes de son expérience dans le hentai. Attachez les chien(ne)s de garde, sa production n’était pas bien méchante comme en témoigne les fantasmes ordinaires de POLLINIC GIRLS ATTACK, histoire de nymphomanie contagieuse qui s’empare d’une ville entière. S’il en faut bien plus pour faire lever un sourcil du Coyote, on se demande quand même quel regard il porte sur les deux aspects de sa carrière ! En 2008, Setona Mizushiro (L’INFIRMERIE APRES LES COURS) nous confiait qu’elle considérait le boy’s love comme

« une sorte d’exutoire, un monde fantaisiste à la limite de la science-fiction » qui lui permet de briser les règles et de libérer son imagination. Koume regarde-t-il ses hentai de la même façon ? « J’aurais tendance à aller dans son sens, c’est vrai que les auteurs ont souvent plus de marge de manœuvre dans le hentai, mais je ne vois pas pour autant la création d’un manga grand public comme une privation de liberté. Dans le fond, je ne fais aucune différence : dessiner c’est mon métier et ma passion, qu’il s’agisse de hentai ou pas ».

Histoire de finir l’interview sur une note légère, on lui pose notre question fétiche du moment : en plein bouclage d’un chapitre et donc sous la pression du chronomètre, quel est son plat préféré ? Après avoir ri de bon cœur, Keito Koume lâche :

« Je voudrais manger de la viande ! Mais un bon plat de viande, ça endort… alors je me contente d’onigiri ! ».

Interview de Laurent Lefebvre publié dans Coyote Mag n°46 (été 2013)

 

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